Ses longs doigts viennent se glisser autour de la couronne d’or, qu’il pose sur son trône. Il vient de prononcer un discours devant quelques personnes. Diffusé à la radio, pour le peuple eartanarien seulement. Izolda est toujours sur son trône elle, le regard qui refuse de se poser sur celui de son mari. Son mari qui l’abandonne. Même si elle sait pourquoi il fait ça, Adonis sait qu’elle aura du mal à lui pardonner. Quand il se retourne, la foule le dévisage d’un air qui n’a pas grand-chose de bienveillant. Le brun déglutit, il descend les quelques marches et traverse cette foule à moitié hostile pour sortir de la pièce. La porte se ferme derrière l’ancien roi, et alors qu’il se rend au dehors, il n’accorde pas un regard en arrière à ce qu’il laisse derrière lui. Izolda, mais aussi Artémis, et Hermès, chacun dans leurs berceaux. Artémis, qui n’a que quelques mois, qui ignore qu’elle est censée devenir reine, car son père vient de l’abandonner.

La voiture l’attend au pied du palais, et Adonis s’y engouffre. « La gare, rapidement. » La radio est allumée, et Adonis sait ce que ça veut dire. Il soupire, mais la voiture se met en route, et il ne doit pas répéter son ordre. Il reste un Griffith, et même si son autorité n’a plus rien de suprême, elle reste supérieure à celle du commun des Eartanariens. Arrivé à la gare, Adonis sort de la voiture. Le train attend, car tout était orchestré à l’avance. Le brun inspire profondément, il se retourne juste une fois vers son palais. Sa dernière pensée va à sa fille. Il espère la revoir un jour, il espère qu’avoir choisi l’homme de sa vie plutôt que son trône – et que sa famille – ne lui sera pas fatal.

Il faut presque une journée au train pour arriver à Dragondale. Le soleil se couche quand Adonis pose un pied sur le sol sableux de la capitale. Le Griffith est accueilli par une délégation surprise, qui ne s’attendait pas à accueillir ce qu’ils pensent encore être un roi. Sans attendre, Adonis leur demande de le conduire à leur monarque. Le petit homme qui semble être en charge s’incline presque assez bas que pour faire tomber ses lunettes de son nez. Celles-ci ne font que glisser, et quand il se relève, il les remonte de son index. Adonis ne fait cependant pas attention aux détails – pour une fois – et se contente de suivre l’homme quand celui-ci ouvre la marche.

Aucun garde ne l’accompagne, et personne ne semble le remarquer. Ou alors, si ils le remarquent, ils ne disent rien. Pour une fois, Adonis se sent libre. Il n’y a personne pour le suivre à la trace, allié ou pas. Il respire, et pourtant, sa poitrine est contractée, écrasée par un poids. « Faites prévenir Sa M…. » Adonis lève la main. « Non, ne lui dites rien. Ma visite est une surprise. » L’homme hésite, il lance un regard à une femme qui les accompagne. La rousse hoche la tête, et l’homme reprend sa route. Et puis, au bout d’une minute. « Sa Majesté est dans son bureau, peut être devriez-vous… » « Taisez-vous. » Il use une dernière fois de son autorité royale pourtant perdue, et ouvre la porte doucement. Cal n’est pas là, mais la pièce est grande, il y a une porte ouverte, sur une bibliothèque. Adonis s’y rend à pas léger, il a presque peur, l’homme.

Le blond se tient là, dos à lui, il semble lire un livre, au vu de sa posture. Adonis s’approche, Le tapis étouffe totalement ses pas, et le rend silencieux. Il est si proche, désormais, qu’il sent l’odeur de son amant enivrer ses sens, il laisse ses doigts glisser contre son dos, et puis contre son ventre, et il sent que Cal est surpris, et bouge, alors il souffle. « C’est moi, Adonis. » et se hisse sur la pointe des pieds pour poser un baiser contre sa nuque, et enfouir son visage contre l’arrière de son cou. Cal se retourne entre les bras de l’Eartanarien, sans un mot. Il l’observe. Derrière lui, sur un guéridon : un livre, probablement celui qu’il lisait. Adonis ne le voit même pas.

Adonis évite une question en venant poser sa bouche contre celle de son amant, qui répond à son baiser. Il sait que Cal est surpris, après tout Adonis est censé regner à Greenstall, et ne pas faire une visite surprise à un amant. D’ailleurs, le blond s’éloigne un peu de sa bouche, une main sur la joue du Griffith. « Qu’est-ce que tu fais ici ? » Adonis secoue doucement la tête, et vient réclamer un autre baiser. Encore une fois écourté par Cal, qu’il commence à sentir agacé, ou inquiet, ou les deux. « Je ne peux pas continuer comme ça… » Souffle le brun. Cal s’éloigne un peu de lui, définitivement inquiet, désormais.

« Comme ça ? » Il ne semble pas comprendre. Adonis déglutit. Ses doigts toujours contre le dos du blond. Il n’ose plus le regarder en face, et regarde plutôt le premier bouton de sa chemise, qui n’est même pas fermé, d’ailleurs. La chaleur, peut être ? Même Cal doit la ressentir… « Comme ça sans toi, à être roi à Greenstall, alors que tu es roi ici. Je ne peux pas continuer comme ça. J’ai des héritiers, une femme plus que compétente. La couronne est à eux, désormais. » Cal s’éloigne. « J’ai abdiqué. » un silence. « Parce que je ne peux plus continuer sans toi. »